Une bouffée d’oxygène… ou une illusion ? Il semblerait que le «dégel» annoncé entre l’Etat et la presse ne soit qu’une chimère. Selon Mamadou Ibra Kane, président du Conseil des diffuseurs et éditeurs de la presse du Sénégal (Cdeps), la situation de la presse sous le magistère du Président Bassirou Diomaye Faye est loin d’avoir évolué positivement. Pire encore, elle semble s’être aggravée. «Beaucoup de fausses informations circulent sur le dégel entre la presse et le nouveau régime issu de la 3ème alternance politique au Sénégal. Aujourd’hui, jeudi 21 novembre 2024, la presse sénégalaise a vu, au contraire, sa situation empirer, particulièrement pendant tous les 8 mois du magistère du Président Bassirou Diomaye Diakhar Faye. D’où vient donc cette fallacieuse information de bouffée d’oxygène pour la presse ou de dégel entre les médias et le nouveau régime ?», a demandé le président du Cdeps.

L’élément déclencheur de cette fronde ? Le blocage des comptes bancaires des entreprises de presse par la Direction générale des Impôts et domaines (Dgid). Bien que le directeur de la Dgid, Abdoulaye Diagne, ait prétendu avoir ordonné la levée de ces blocages, beaucoup d’entreprises de presse n’ont pas encore reçu le document nécessaire à la levée des blocages bancaires. «J’ai alors demandé aux entreprises de presse de se rapprocher de leur centre fiscal pour demander une mainlevée, base légale pour les banques pour débloquer leurs comptes bancaires. Toutes les entreprises de presse n’ont pas encore obtenu ce document miracle. Par conséquent, il serait faux de parler d’un quelconque «dégel» ou «bouffée d’oxygène»», confie Mamadou Ibra Kane, dans une note d’information rendue publique. A en croire le président du Cdeps, la crise que traverse la presse sénégalaise est donc double : fiscale et économique. Sur le plan fiscal, il pointe du doigt l’absence de mesures compensatoires pour les entreprises de presse pendant la pandémie du Covid-19, l’absence de moratoires sur les dettes fiscales et les saisies d’équipements et des mobiliers avec blocage des comptes bancaires.

Quant à la situation économique, elle se traduit par un non-paiement des créances de l’Etat envers les médias, des résiliations unilatérales par l’Etat et ses démembrements des contrats publicitaires avec les entreprises de presse privée et le blocage de l’aide à la presse au titre de l’année 2024. «Cette crise économique et financière a engendré un drame social pour les travailleurs des médias avec, comme corollaires, des licenciements, du chômage technique, des arriérés de salaire, des retards des cotisations sociales et l’interruption de la couverture maladie. Cette précarité extrême fait de la presse sénégalaise un secteur sinistré avec des entreprises en situation de quasi-faillite, un danger pour la démocratie», regrette-t-il. Et face à cette situation, précise Mamadou Ibra Kane, la presse continue malgré tout de remplir sa mission de service public. «La presse sénégalaise, déjà magnifiée pour son rôle dans les trois alternances politiques au Sénégal, a malgré tout continué à assurer sa mission de service public avec une couverture exemplaire des élections législatives anticipées. Au soir du 17 novembre 2024, la presse a relayé les résultats du scrutin, ce qui a permis notamment d’annihiler tout trouble post-électoral. Encore une fois, au service de la démocratie», indique-t-il. Mais si la presse persévère dans son rôle essentiel, elle attend désormais, d’après Mamadou Ibra Kane, «la matérialisation de l’appel, le 14 août 2024, au dialogue rénové du président de la Répu­bli­que».

LeQuotidien