Pour Alamine Ousmane Mey, il est important de penser à inclure des clauses de suspension sans discussions préalables du service de la dette pour les pays fragiles, dans le cadre d’une nouvelle architecture financière internationale.
Le ministre Alamine Ousmane Mey (photo), en charge de l’Economie et de la Planification au Cameroun, a estimé que le cadre commun mis en place par le G20, pour rendre la dette des pays à faibles revenus soutenable dans un contexte encore marqué par les effets de la Covid-19, était une bonne idée, mais qui manquait d’efficacité.
« C’est une bonne initiative, mais elle prend trop de temps », a fait savoir M. Mey lors d’un entretien réalisé en marge des rencontres de printemps de la Banque Mondiale et du FMI par Atlantic Council, un think tank américain spécialisé dans les relations internationales. Il a ainsi expliqué subtilement les raisons pour lesquelles son pays n’a pas encore recouru au processus.
Pour ce responsable africain, une solution plus efficace consisterait à inclure dans le futur, des options de suspension de paiement du service de la dette sur une période définie (« 2 ans par exemple »), dans l’hypothèse où surviendrait une crise, sans qu’il ne soit besoin d’engager des discussions interminables. Cette vision se rapproche des propositions et appels de dirigeants africains pour une nouvelle architecture de la finance internationale.
Le cadre commun du G20 peine en effet à apporter des résultats tangibles. Seuls trois pays sur les 54 (l’Éthiopie, le Tchad et la Zambie) que compte l’Afrique y ont fait appel jusque-là, et ces processus connaissent des retards. Le Fonds Monétaire International (FMI) a lui-même reconnu l’existence de ces défis et estimé, entre autres, qu’une option plus attractive aurait été de suspendre le service de la dette durant les périodes de négociation.
Alors que la dette globale due aux marchés internationaux des capitaux a atteint les 300 000 milliards $, les 790 milliards $ de dette extérieure des pays de l’Afrique subsaharienne (hors Afrique du Sud) en 2021 poussent l’écosystème des investisseurs à conclure que le profil des créanciers de la région est risqué, alors que cette dernière n’a enregistré que très peu de défauts de paiement.
En outre, le principal indicateur de soutenabilité, à savoir le poids de la dette sur le produit intérieur brut, reste assez modéré, avec une moyenne de seulement 55,5 % en 2022, selon des estimations du FMI, et surtout, la dette des entreprises y est assez faible. Les analyses de soutenabilité actuelles prennent surtout en compte le poids du service de la dette sur le total des exportations.
Elles ne tiennent cependant pas toujours compte du fait que l’Afrique n’est pas souvent à l’origine de ces crises globales. Des facteurs externes tels que la hausse du dollar et l’inflation qui affectent les chaînes d’approvisionnement, et sur lesquels les dirigeants de la région n’ont aucun contrôle, sont également à prendre en considération.
Il n’est pas fréquent d’entendre des responsables africains parler de leur vision d’une nouvelle architecture financière internationale. Les ministres africains de l’Économie ont mis en place un groupe de travail pour proposer des issues possibles, dans le cadre de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA). La Banque africaine de développement abordera également cette question lors de ses prochaines assemblées générales prévues en mai prochain.
Ecofin