Cette semaine, nous réfléchissons aux impacts considérables de la kleptocratie.

Des journalistes d’investigation – avec un peu d’aide de nos chapitres au Monténégro et au Royaume-Uni – ont créé un référentiel des actifs offshore des individus liés au Kremlin. Des manoirs londoniens à un avion Airbus privé, le nouveau Russian Asset Tracker répertorie les propriétés – d’une valeur totale de 17 milliards de dollars – de quelque 11 Russes visés par la dernière vague de sanctions occidentales.

Parmi eux se trouve l’homme d’affaires milliardaire Gennady Timchenko, dont le yacht immatriculé dans les îles Vierges britanniques a déjà été saisi par les autorités italiennes. Cependant, les forces de l’ordre en France et en Finlande devront peut-être encore examiner de près les deux autres propriétés que les journalistes lui ont associées.

Mais Timchenko a déjà montré qu’il pouvait garder une longueur d’avance sur les autorités.

En 2014, l’homme d’affaires russe faisait partie des personnes ciblées par les États-Unis en réponse à l’annexion de la Crimée par la Russie. La veille des sanctions, Timchenko a vendu sa participation dans la société pétrolière suisse Gunvor afin que la société ne subisse pas de répercussions.

Timchenko n’était pas seulement copropriétaire de Gunvor ; il l’a également co-fondé.

Le gouvernement américain a précédemment déclaré que les activités de Timchenko dans le secteur de l’énergie étaient « directement liées à Poutine » et que le président russe lui-même « pourrait avoir accès aux fonds de Gunvor ».

La société fait maintenant de grands efforts pour se distancer du régime russe, mais jusqu’à récemment, Gunvor commercialisait une grande partie du pétrole russe. De plus, les relations de l’entreprise avec le gouvernement russe l’auraient aidée à s’étendre en Afrique et à élaborer un plan qui a fini par tromper le peuple congolais.

Il y a quelques années, une enquête de Public Eye a allégué que Gunvor avait exploité ses liens avec le Kremlin pour décrocher un accord commercial lucratif en République du Congo – à une époque où Timchenko était toujours copropriétaire de la société. Un ancien dirigeant de Gunvor aurait promis au fils du président congolais Denis Sassou Nguesso qu’il utiliserait la connexion de l’entreprise avec le Kremlin – même en vérifiant le nom de Poutine lui-même – pour obtenir un accord de coopération économique entre les deux pays. Cette promesse a apparemment été tenue. (Suite à une enquête suisse sur la corruption dans les opérations de Gunvor en République du Congo et en Côte d’Ivoire, Gunvor a accepté de régler à hauteur de près de 100 millions de dollars.)

À la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les dommages généralisés causés par la kleptocratie semblent enfin plus clairs que jamais. Et lorsque nous parlons de kleptocratie, nous entendons non seulement les corrompus, mais aussi leurs complices et facilitateurs.

Nous exigeons des comptes depuis longtemps. Pour cela, il est essentiel de rechercher des richesses suspectes, y compris des biens immobiliers et des produits de luxe présentés dans le Russian Asset Tracker – ainsi que de nombreux autres biens qui sont actuellement hors de portée des autorités. Pour éviter de futures souffrances, les gouvernements doivent également accélérer de toute urgence les principales politiques de lutte contre la corruption, dont certaines ont été mises de côté pendant des années.