La délégation de service public (DSP) est un mécanisme juridique qui permet à l’état ou à une collectivité publique de confier, sous certaines conditions, l’exploitation d’un service public à un partenaire privé.
Cela implique que l’État ou une autre autorité publique délègue la gestion d’un service public à une entreprise privée, en général pour une durée déterminée, avec des objectifs clairs concernant :
-la qualité du service,
-l’accès et la continuité du service.
-la gestion financière ,l’efficacité et l’efficience du service publique.
Dans le contexte de la santé au Sénégal, la délégation de service public peut représenter une alternative viable pour le financement et la gestion de certains aspects des services de santé. Elle peut être utilisée pour améliorer l’efficacité,l’accessibilité et la qualité des soins tout en impliquant le secteur privé dans le financement des infrastructures et la gestion de services de santé publics.
La délégation de service public fonctionne sur la base d’une politique par laquelle une entité publique (État, collectivité locale, ou établissement public) confie à une entreprise ou entité privée la gestion d’un service public, en l’occurrence dans le domaine de la santé.
La DSP peut prendre plusieurs formes, parmi lesquelles :
– La gestion déléguée: le privé gère une infrastructure existante (ex. hôpital, centre de santé) mais reste soumis aux objectifs publics.
– La concession : l’entreprise privée finance et gère le service public,pour le bien de la collectivité.
Plusieurs Avantages de la DSP peuvent être notés pour le financement de la santé au Sénégal:
- a) Mobilisation des ressources privées pour les infrastructures sanitaires.
La DSP peut permettre de mobiliser des fonds privés pour la construction, l’exploitation et la maintenance d’infrastructures sanitaires (hôpitaux, cliniques, centres de santé).
Cette approche peut aider à pallier le manque de financement public,notamment dans un pays comme le Sénégal, où les ressources publiques pour la santé sont limitées.
Les investissements privés dans les infrastructures peuvent réduire la pression sur le budget de l’État tout en garantissant l’accès à des services de santé de qualité.
– Amélioration de l’efficacité et de la gestion des services:
Le secteur privé est souvent perçu comme plus efficace dans la gestion de services, en raison de sa flexibilité,de son innovation et de son orientation vers la performance.En déléguant certains services de santé à des entreprises privées, il est possible d’obtenir une gestion plus dynamique,efficace , plus réactive et plus qualitative.
L’accélération de la couverture sanitaire
Dans un système où l’État a du mal à étendre l’accès aux soins à toute la population (en particulier dans les zones rurales ou les quartiers urbains défavorisés), la DSP peut permettre une extension rapide des services de santé, en particulier lorsque l’entreprise privée est motivée par des incitations financièresliées à l’accès:
-Défiscalisation
-Détaxation
-Subvention
Cela peut également faciliter la mise en place de structures sanitaires modernes, notamment dans les zones mal desservies par les services publics traditionnels.
Partenariat public-privé pour l’innovation
Le secteur privé, souvent plus souple et moins bureaucratique que le secteur public, peut apporter de nouvelles solutions pour la gestion des services de santé, en particulier dans le domaine des technologies médicales des systèmes d’information hospitaliers et des solutions d’efficacité énergétique.
L’implication du privé peut aussi entraîner l’introduction de pratiques innovantes dans la gestion des services de santé, y compris la mise en place de la télémédecine,des
solutions de financement innovantes ou encore des modèles de soins plus intégrés.
Partage des risques financiers
Dans une DSP, le risque financier de la gestion du service public est partagé entre l’entité publique et l’entité privée. Cela permet de réduire la pression sur les finances publiques et d’atténuer les risques liés à la gestion des infrastructures sanitaires, tout en permettant une meilleure prévision des coûts.
Défis et limitations de la DSP dans la santé au Sénégal
Risque de privatisation excessive
L’un des principaux défis de la DSP réside dans le fait qu’elle peut conduire à une privatisation excessive des services publics. Si les opérateurs privés sont principalement motivés par des objectifs financiers,cela pourrait entraîner une augmentation des coûts pour les patients, en particulier ceux des couches sociales vulnérables qui dépendent de soins subventionnés ou gratuits.
Il est donc crucial de trouver un équilibre entre le financement privé et la garantie de l’accès universel aux soins de santé pour la population.
Contrôle et régulation
La DSP nécessite une régulation stricte par l’État afin d’assurer la qualité des services fournis, de prévenir les abus et de garantir que les objectifs publics (tels que l’accessibilité,l’équité , et la qualité des soins) soient respectés. Un manque de contrôle ou une surveillance insuffisante pourrait entraîner des inefficacités,des abus financiers ou des déviations par rapport aux missions sociales du service de santé.
Acceptation sociale par les acteurs locaux:
La mise en œuvre d’une DSP peut être confrontée à la résistance des acteurs locaux,y compris des syndicats de professionnels de la santé, des associations de patients, et d’autres parties prenantes qui pourraient percevoir cette approche comme un moyen de démanteler le service public ou de favoriser des intérêts privés au détriment des besoins sociaux.
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Exemples internationaux et enseignements pour le Sénégal:
De nombreux pays ont déjà utilisé la délégation de service public pour financer et gérer des services de santé,et il existe plusieurs modèles intéressants que le Sénégal pourrait envisager. Par exemple :
– La France a recours à la DSP dans plusieurs hôpitaux publics pour des services comme la gestion des cliniques ou l’entretien des infrastructures.
– Le Maroc et la Tunisie ont également expérimenté la DSP dans le secteur hospitalier pour améliorer la gestion des équipements et des soins.
Ces expériences montrent qu’une supervision rigoureuse et une coordination efficace entre les acteurs publics et privés sont essentielles pour garantir le succès du modèle de la DSP dans le secteur de la santé
La délégation de service public peut être une alternative viable aux modes de financement traditionnels pour le secteur de la santé au Sénégal. Elle permet de mobiliser des ressources privées,améliorer la gestion des infrastructures sanitaires,et accélérer l’accès aux soins de qualité.Toutefois, son succès dépend d’une régulation rigoureuse,d’une partenariat équilibré entre le public et le privé, et de la garantie que l’accessibilité et l’équité des soins restent des priorités.
Dr Serigne Falilou Samb
Polyclinique Louis Pasteur
Rufisque