En dépit d’une reprise économique fragile, la croissance économique reste en berne en Afrique subsaharienne, exposant des millions de jeunes au risque d’exclusion. Selon la dernière édition du rapport Africa’s Pulse, intitulée « Transformer l’éducation pour une croissance inclusive », deux priorités s’imposent : stabiliser les économies régionales et moderniser les systèmes éducatifs afin de doter la population active de compétences adaptées aux besoins du marché.
Le rapport semestriel de la Banque mondiale sur l’Afrique subsaharienne prévoit une croissance régionale de 3 % en 2024, contre 2,4 % en 2023, grâce à l’augmentation de la consommation et des investissements privés. Par ailleurs, l’inflation devrait reculer, passant de 7,1 % en 2023 à 4,8 % en 2024, sous l’effet de politiques monétaires rigoureuses et d’une meilleure stabilisation des devises.
Cependant, cette reprise ne suffira pas à réduire significativement la pauvreté. Le PIB par habitant n’augmentera que de 0,5 % en 2024, loin de la moyenne de 2,4 % enregistrée entre 2000 et 2014. Plusieurs freins menacent de ralentir les progrès, notamment les conflits, le changement climatique et le poids croissant de la dette. En 2024, le service de la dette représentera 34 % des recettes publiques, compromettant les investissements nécessaires dans des secteurs stratégiques comme l’éducation, la santé et les infrastructures.
« Les efforts des gouvernements africains en matière de stabilisation financière et de réduction des déficits sont notables, mais le poids de la dette limite les investissements indispensables pour assurer une croissance inclusive à long terme », souligne Andrew Dabalen, économiste en chef de la Banque mondiale pour l’Afrique.
Transformer l’éducation : une nécessité pour la jeunesse et la croissance
La Banque mondiale insiste sur la nécessité de transformer l’éducation pour répondre aux défis d’une population en croissance rapide. En effet, la population active de l’Afrique subsaharienne augmente plus vite que celle des autres régions du monde, portée par les progrès dans la réduction de la mortalité infantile au cours des deux dernières décennies. Pourtant, l’Afrique reste la région qui investit le moins par habitant dans l’éducation.
Pour atteindre l’objectif d’une éducation universelle d’ici 2030, le rapport estime qu’il faudra accueillir 170 millions d’enfants et d’adolescents supplémentaires, construire environ 9 millions de salles de classe et recruter 11 millions d’enseignants. Si des avancées ont été réalisées — notamment avec 270 millions d’enfants inscrits à l’école primaire et secondaire —, beaucoup reste à faire pour améliorer la qualité de l’éducation et des formations.
« Pour tirer pleinement parti des opportunités offertes par l’économie numérique et la transition écologique, les jeunes Africains doivent être bien instruits et qualifiés », a affirmé Andrew Dabalen. Une planification basée sur des données probantes et des investissements judicieux est nécessaire pour renforcer l’accès à l’éducation, améliorer l’apprentissage et ouvrir de meilleures perspectives d’emploi.
Le défi de l’emploi et de l’entrepreneuriat
Le rapport met également en lumière des lacunes préoccupantes : sept enfants sur dix n’ont pas accès à l’enseignement préprimaire, et moins de 1,5 % des jeunes âgés de 15 à 24 ans suivent une formation professionnelle, contre 10 % dans les pays à revenu élevé. Ces écarts compromettent le développement économique et social de la région.
Pour pallier ces manques, la Banque mondiale recommande de promouvoir l’entrepreneuriat et les startups, de soutenir les petites entreprises et d’encourager l’installation de sociétés étrangères. Ces initiatives sont cruciales pour offrir aux jeunes diplômés des opportunités d’emploi et favoriser leur insertion durable sur le marché du travail.
L’éducation, véritable levier de développement, devra ainsi jouer un rôle clé pour garantir à l’Afrique une croissance inclusive et pérenne.